Le branle du sanctus – Nérée Beauchemin
Dans l’air religieux des dimanches, ondulent
Ces accords, graves comme un angélus du soir,
Que les cloches de bronze, au rythme d’encensoir,
Au sanctus de la messe, en sourdine, modulent.
Sanctus ! Sanctus ! Rosaire aux doigts, priant tout bas,
Grand’mère, dans un rêve extatique plongée,
D’un seuil à l’autre seuil, par la chambre imagée,
Promène le marmot qui fait ses premiers pas.
Le pied rose, à demi, sur le plancher se pose,
Et le petit genou fléchit à tout moment.
La pavane pieuse est un encensement ;
Le couple oscille, à chaque escousse, à chaque pause.
Sonnerie et lumière animent le tableau,
Et, dans un harmonique unisson, font cortège
Aux cheveux blancs qu’argente une mousse de neige,
Aux blonds cheveux que berce un roulis de berceau.
Ils vont, tant que le branle épand ses larges ondes,
Très révérencieux, comme en procession.
On croit ouïr des voix de bénédiction.
Et l’humble vieille songe à des choses profondes.
La cloche, semble-t-il, rythme l’envolement
Du bonnet de baptême aux blancheurs irréelles,
Et le balancement du clocher de dentelles
Qui pointe, comme flèche, au chef de grand’maman.
Sanctus ! Dans l’or léger que la vitre tamise.
Dans l’or que dissémine un soleil de juillet,
Les deux fronts inégaux se nimbent d’un reflet,
Et la chambre éblouit comme une nef d’église.
Sanctus ! Heureux l’enfant qui commence à marcher
En ces murs imagés que le cierge illumine,
Et qui, de Chandeleur en Chandeleur, chemine
Dans l’orbe de musique et d’encens du clocher.