Les vedute du Royaume des Deux-Siciles – Collection Smith-Lesouëf
Auguste Lesouef était issu d’une famille normande qu’une bonne tradition d’économie, pour ne pas dire d’avarice, avait rendue prospère. Jeune homme doué, mais d’un naturel indolent et pessimiste, il fit quelques études qu’il ne poussa pas au-delà d’une licence en droit, et fut placé par son père successivement chez un marchand de savon puis chez un avoué. En 1857, à la mort de son père, il se trouva à la tête d’une honorable fortune.
En compagnie de son ami Léon de Rosny, il fit plusieurs voyages à l’étranger, puis à partir de 1889 ne quitta plus la capitale. Il habitait boulevard Beaumarchais une assez banale maison de rapport, et tout son temps passa à collectionner – on serait tenté de dire : entasser- livres, manuscrits, cartes, gravures, dessins, médailles et objets divers. Tous les après-midi, il se rendait chez ses fournisseurs habituels, Belin, Champion, Feuardent… et se faisait renseigner sur les ventes publiques mais n’y paraissait jamais. Il ne voyait pratiquement personne. hormis sa sœur Anne-Léontine, mariée à un Anglais, Jules Smith, et ses deux nièces, Jeanne, qui lui faisait la lecture, et Madeleine, peintre médiocre, élève de Jean-Jacques Henner, qui devait épouser l’historien Pierre Champion. Il mourut en 1906 des suites d’un accident, ayant été renversé par un fiacre quelques jours plus tôt.
La collection d’Auguste Lesouef fut donnée à l’Etat par ses héritières en 1913. Pierre et Madeleine Champion l’avaient transférée dans leur propriété de Nogent-sur-Marne (l’ancienne maison de Watteau, où celui-ci était mort en 1731), faisant construire « Un bâtiment à cet effet dans le parc. Hormis les médailles, les manuscrits ainsi qu’un certain nombre d’ouvrages anciens jugés plus précieux, transférés à la réserve des livres rares à la Bibliothèque Nationale au cours de la dernière guerre, elle y resta jusqu’en 1980. A cette date, elle fut entièrement transportée dans le quadrilatère Richelieu.
Étrangement hétérogène, la collection Smith-Lesouef compte, en ce qui concerne les gravures, près de 17 500 numéros correspondant à des unités bibliographiques qui peuvent contenir plusieurs pièces, voire plusieurs dizaines de pièces chacune. Cette collection, tout à fait considérable, se divise en cinq grandes masses : Topographie (le vieux Paris étant un de ses principaux sujets d’intérêt, il avait acquis un ensemble de 1 383 dessins de Chauvet représentant des monuments ou des sites voués à la destruction) ; Histoire (avec une nette prépondérance pour l’histoire révolutionnaire) ; Modes et Costumes, uniformes militaires (citons plus de 130 gouaches originales de Charles de Luna) ; enfin et surtout art, avec un ensemble inestimable d’estampes originales et de reproduction (50 Bosse, 250 Bonnart, 38 Boilly, 200 Carle Vernet dont 28 aquarelles originales, 250 Daumier, 150 Rops…).
Ce sont ici de très délicates vedute italiennes à la gouache datant de 1850 que nous présentons. Véritable invitation aux voyages, elles ne manquent pas de faire rêver, par leur délicate beauté naïve.