Le vent – Tomas Tranströmer
Le vent a pénétré dans la forêt de pins. Un murmure pesant et léger.
La Baltique murmure aussi au milieu de l’île, au fond de la forêt nous voici en haute mer.
La Vieille femme haïssait le murmure des arbres. Son visage se fermait de mélancolie, chaque fois que la tempête se levait :
« Il nous faut penser à ceux qui sont là-bas, sur leurs bateaux. »
Mais elle entendait encore autre chose dans ce murmure, tout comme moi, nous sommes parents.
(Nous marchons côte à côte. Elle est morte depuis trente ans déjà.)
Le murmure dit oui et non, entente et mésentente.
Le murmure dit trois enfants bien portants, un au sanatorium et deux autres disparus.
Le grand courant d’air qui insuffle la vie à certaines flammes et qui en éteint d’autres.
Les circonstances.
Le murmure : Délivrez-moi, Seigneur, les eaux me pressent l’âme.
On marche longtemps et on écoute et on arrive au moment où les frontières s’ouvrent
ou plutôt
où tout devient frontière. Une place découverte plongée dans l’obscurité. Des gens sortent groupés des bâtiments faiblement éclairés tout autour. Une rumeur.