Valiha – Jean-Joseph Rabearivelo
Blocs d’émeraude pointus
surgis du sol
parmi l’herbe dont le fleuve est cilié,
et ressemblant à d’innombrables cornes de jeunes taureaux
enterrés vivants par un clair de lune.
Il est une eau pure, il est une eau secrète,
froide comme le sable où elle se cache,
qui remplit ces frêles conques non perforées.
Puis deviennent une forêt de flûtes non travaillées,
deviennent un peuple de fûts
où de l’eau est captive depuis les origines :
deviennent des bambous bruissants de nids
et de vents.
Ils y résonneront
jusqu’à ce qu’y vienne un artiste
qui brisera leur jeunesse de dieux
et qui les écorchera dans sa cité
et tendra leur peau
avec des fragments de calebasses
et des bribes de lianes.
Et lorsque le soleil sera rouge,
lorsque les étoiles écloront
ou que les matins battront des ailes,
au bord de l’âtre
ou sur une natte neuve,
les bambous ne seront plus
que des choses chantantes
entre les mains des amoureux.