Une bonne fois pour toutes – Sergueï Essenine
Une bonne fois pour toutes séparons – nous –
oui, je m’en vais, champ de ma patrie !
Lointaines sont les feuilles ailées de mes peupliers,
aucune ne résonne en moi ni ne carillonne.
Chien fidèle, tu gis depuis longtemps sous l’herbe.
Toi ma maison – inhabitée, toit effondré.
Aussi Ici, à Moscou, au milieu de ces rues ;
j’exhale l’âme, à la grâce de Dieu.
Oui, je l’aime, je l’aime cette ville, bouffie et marécageuse,
maintenant oui, et blafarde.
Asie, toi somnolente et dorée,
tu as trouvé coupoles et pays de calme.
Et je vais, je vais bientôt, sous la lune,
je vais sous la lueur de la lune, je vais sous la lueur du diable,
je titube dans les rues, les familières,
et je retourne encore dans mon bistrot.
Dans mon bistrot cela craint et cela beugle,
mais toute la nuit, jusqu’à ce que le matin vienne,
je récite aux putes, ce que j’ai écrit,
et avec les vauriens je partage l’essence.
Cœur, tu bats, tu bats plus vite encore, tu bats à te perdre,
et ainsi je parle, je parle due la bonne chance ;
« Comme vous êtes, je le suis aussi : paumé,
comme je suis, il n’y a pas de retour. »
Chien fidèle, tu gis depuis longtemps sous l’herbe.
Toi ma maison – inhabitée, toit effondré.
Aussi Ici, à Moscou, au milieu de ces rues ;
j’exhale l’âme, à la grâce de Dieu.