Un de leurs dieux – Constantin Cavafy
Lorsque l’un d’eux traversait l’Agora de Séleucie,
A l’heure où la nuit tombe,
Sous l’apparence d’un éphèbe,
Svelte et beau,
Aux cheveux noirs parfumés d’aromates
Et dont les yeux disent la joie d’être immortel.
Ceux qui passaient le contemplaient,
Se demandaient l’un l’autre s’ils le connaissaient.
« Est-ce un Hellène de Syrie ?
Un étranger ? »
Mais quelques uns,
L’ayant observé de plus près,
Avaient compris… Et s’écartaient.
Et lui, disparaissant sous les portiques,
Parmi les ombres et les lumières du soir,
Il s’en allait vers ces faubourgs où, la nuit, règnent
La débauche et l’orgie
Et toute espèce de luxures et d’ivresses.
El l’on se demandait lequel d’entre eux
Ce pouvait être.
Et pour quel plaisir louche
Il descendait sur ces routes de Séleucie
Du haut des saintes,
Des éternelles demeures.