Sonnet en prose – Jean Cocteau
(Extrait)
III
Le destin il est vrai m’a donné une apparence humaine
Mais un étrange étranger habite en moi
Je le connais mal et il m’arrive à l’improviste
D’y penser comme on se réveille en sursaut
Parfois l’étranger me laisse en paix et somnole
Parfois il se démène dans sa cellule
Mes œuvres sont ce qui de lui s’évade
Avec police et chiens de police à leurs trousses
Vous êtes me dira-t-on un drôle de corps
Il ne sert que de prison à un seul hôte
Tandis que plusieurs inconnus successifs le figurent
Étranger irascible je ne connais de toi
Que tes révoltes contre ces naïfs qui te servent
Et payent cher de désobéir à tes ordres