Pour les pauvres – Jean-Joseph Rabearivelo
Pour les pauvres dévorés de punaises aussi grosses que le ciel,
pour les exilés qui errent,
venant de la cité du jour,
et pour les rebelles et pour les déserteurs
de l’armée ombreuse montant de la terre,
que veulent faire ces élans de palmiers sans nombre
reluisant comme autant de manches de sagaies enduits de graisse végétale,
qui s’élancent immobiles
et dépassent toutes les maisons
jusqu’à ce que leurs cimes,
résonnant de songes de ramiers,
parviennent au toit du monde ?
Ils y ondulent, s’écrasent, puis s’effeuillent,
mais ne reviennent pas parmi les vivants,
et s’entassent dans le désert des étoiles,
et deviennent des huttes innombrables
pour les mendiants sans litière,
pour les captifs vêtus de leur seule peau puant la poussière,
et pour tous les oiseaux sans nid
qui seront délivrés ensemble.