La terre originelle – Léon Degrelle
On est l’homme d’un peuple, d’un sol, d’un passé.
On peut ne pas le savoir. On peut essayer de l’oublier.
Mais les événements se chargent vite de nous ramener aux sources de vie.
Ils nous ramènent d’abord aux hommes de notre sang : honteuse ou lumineuse, la famille noue autour de nous ses liens, de plus en plus serrés et fermes avec le temps.
Parfois ils étouffent. Jamais on ne s’en débarrasse.
Que le sang soit en jeu, on bondit. Le sang d’avance a raison. On fait corps avec lui, comme si nos veines ne constituaient qu’un organisme et que la famille n’avait qu’un seul cœur, un cœur qui projette le même sang dans chacun d’entre nous et le rappelle de toutes parts au foyer vital.
Il en est de même du pays.
On n’y échappe pas.
La vue d’une estampe jaunie de nos cathédrales, le souvenir de l’odeur des dunes, de la couleur grise de nos coteaux, de la courbe de nos fleuves fait monter à notre gorge un amour qui nous étouffe tant il est ému en grondant.
Le passé du pays s’inscrit jusqu’au fond de notre conscience et de notre sensibilité.
Tout, chez nous, est survivance, renaissance même à notre insu.
Le passé d’un pays renaît dans chaque génération comme le printemps revient, toujours dans des germinations nouvelles.
Nous avons beau être légers, courir le monde, égarer notre esprit : le sol natal envoie dans nos cœur un fluide que nous ne créons pas et qui nous domine.
Et il suffit de la voix d’un poste émetteur captée au pays lointain, apportée par des ondes imprécises, pour que souvenirs, liens et lois se dégagent à nouveau, véritable filigranes inscrits indestructiblement dans la trame de nos jours tourmentés.