La descente de l’Escaut – Franck Venaille
(Extrait)
L’eau
Toute l’eau
L’eau encore elle
L’eau de toujours
Suffira-t-elle cette eau à laver le marcheur de ses fautes ?
Dans un calme proprement effrayant
Le ciel et l’eau ne me dites pas qu’ils vont s’absorber !
Que l’un et l’autre vont copuler et, d’extase, se retourner, se vautrer, faire pleuvoir !
Tout est si calme On n’entend que les pas du marcheur à l’idée fixe : toute cette eau y parviendra-t-elle ?
Du vaste paysage autrefois immergé s’élève une plainte dont nul ne connaît l’origine
Exprime-t-elle ce que les hommes nomment : la douleur ?
Dit-elle ce, qu’à eux-mêmes, se cachent les peupliers serrés comme autant de frères autour de la dépouille du père et qui geignent ! Disant l’angoisse ancestrale des pays plats devant la montée de l’eau
Ah ! Tous ces arbres dressés à l’intérieur même du fleuve
Que je ne sais pas voir mais dont je sens la solitude
Tels les grands crucifiés à l’angle des plaines !