Ils regardent le bleu, mais ne sauront jamais le dire – Jean-Michel Maulpoix
Le monde est un vaste pays inconnu que l’on contemple depuis les terrasses. On choisit les chambres avec vue, celles qui donnent sur la mer, même si l’on sait que la mer ne se donne pas. On l’entend crier derrière les volets : elle est la gorge de la nuit, la voix de ce qui ne parle pas, la récitation muette des lointains, la causerie assourdie du silence, une belle alliance de mots posée comme un emplâtre sur le vide de la langue… Elle ne dit rien, n’explique rien, ne délivre pas de leçon. Et pourtant il convient d’y prêter l’oreille. Écouter ce bruit vide n’est que vivre et se tenir en soi : habiter sa propre pâleur, avec ce curieux désir de couleurs qui démange, qui agace, ce goût de sucre que laissent dans la bouche certains mots. L’infini nous colle aux paupières et nous fait un visage enfariné de clown.