Il prend le large, dit-on de celui qui s’embarque – Jean-Michel Maulpoix
Il s’ébroue, desserre les étreintes et dénoue les doigts qui se crispent. Ses gestes sont rudes : il y va de sa vie. Sur le port, il marche comme un somnambule au pied des grues et des étraves. Déjà ses yeux fixent d’autres cieux : hagards, transis de bleu, ils soulèvent les toitures de la mer. Son cœur de bête traquée s’affole quand ronfle la sirène d’un cargo en partance. Son âme naïve déborde de fables, de noms intraduisibles, de cris et de rumeurs barbares.
Il fait commerce avec nulle part. Obtus et taciturne, son amour manque de mots. Il dérive entre les paquets de cordages. Il se cogne comme un ivrogne contre le large de vin bleu.