Dépouillement – Léon Degrelle
Le bonheur « parce qu’on ne sait pas » n’est pas flatteur.
C’est une espèce de bonheur étroitement végétatif.
L’intelligence n’y est pour rien, ni non plus le cœur.
Le vrai bonheur, le bonheur digne de l’homme, celui qui élève, c’est le bonheur assuré par l’esprit, c’est celui qui est né du dépouillement de l’âme, du renoncement de l’âme, en pleine conscience des plaisirs humains, offerts ou refusés par les circonstances.
Est heureux celui qui n’est pas l’esclave des circonstances, celui qui sait aussi bien jouir du plaisir extérieur que s’en passer.
Tant qu’on souffre d’une privation de cet ordre-là, tant qu’on souffre en comparant son sort matériel à celui des autres, on n’est ni heureux ni libre.
Rester d’une humeur égale, même avec une sorte de dégagement de l’âme quand l’univers extérieur ne forme plus qu’un vide immense, vivre intensément dans cette « absence matérielle », se sentir alors sans regret, maître de ses désirs, les avoir pliés à la domination plénière de l’esprit marque la victoire de l’homme, la vraie, la seule, à côté de laquelle les conquêtes où tout le monde à l’avance capitule et est prêt à déchoir ne sont que des caricatures de puissance.
Toute comparaison paraît alors risible, à côté de la libération apportée par la maîtrise de l’esprit sur les biens, les besoins et les esclavages.
Nous nous sentons l’âme dégagée des vieilles chaînes rouillées qui nous rivaient à de médiocres conformismes.
Nous serrons dans nos mains le Destin, le Destin clairement découvert dans sa nudité libératrice.
Le bonheur peut naître partout. Il n’est pas au dehors, il est au-dedans de chacun de nous, avec les plus complètes possibilités.