Après le souper et la causerie – Walt Whitman
Après le souper et la causerie — après la journée finie,
Me voici comme un ami qui prolonge le moment où il lui faut quitter pour la dernière fois ses amis,
Qui dit Adieu et encore Adieu de ses lèvres émues,
(Il est si dur pour sa main de lâcher ces mains — jamais plus ils ne se reverront,
Jamais plus pour communier dans la douleur et la joie, jeunes et vieux.
Un immense voyage l’attend, d’où il ne reviendra plus).
Qui fuit, qui recule l’instant de la séparation — qui cherche à différer si peu que ce soit le dernier mot.
Qui, même à la porte de la rue, se retourne — revient sur des recommandations superflues — qui, même lorsqu’il descend les marches du perron.
Cherche quelque chose pour allonger d’une minute son adieu — tandis que les ombres du soir s’épaississent,
Que les adieux, les mots échangés diminuent — et que le visage et la silhouette du partant de plus en plus se fondent.
Pour bientôt se perdre à jamais dans la nuit — du partant à qui il en coûte, ô tellement ! De s’en aller.
Qui bavarde jusqu’au suprême instant.