Zarafa – Rémi Bezançon
Sous un baobab, un vieil homme raconte aux enfants qui l’entourent, une histoire : celle de l’amitié indéfectible entre Maki, un enfant de 10 ans, et Zarafa, une girafe orpheline, cadeau du Pacha d’Egypte au Roi de France Charles X. Hassan, prince du désert, est chargé par le Pacha de conduire Zarafa jusqu’en France mais Maki, bien décidé à tout faire pour contrarier cette mission et ramener la girafe sur sa terre natale, va les suivre au péril de sa vie. Au cours de ce long périple qui les mènera du Soudan à Paris, en passant par Alexandrie, Marseille et les Alpes enneigées, ils vont vivre mille péripéties et croiser la route de l’aéronaute Malaterre, des étranges vaches Mounh et Sounh et de la pirate Bouboulina…
Les Français ont toujours leurs mots à dire en proposant leur alternative aux productions animées américaines. Pour servir la soupe aux enfants, deux auteurs d’horizons différents se sont unis. On trouve tout d’abord, pour la technique, un habitué du genre, Jean-Christophe Lie, issu du milieu, et plus particulièrement des studios Disney de Montreuil, époque Tarzan et le Bossu de Notre dame. Il a bossé également sur Les Triplettes de Belleville, Kirikou et les bêtes sauvages et s’est tout particulièrement distingué avec son propre court métrage, L’homme à la Gordini. Mais le père naturel du projet n’est autre que Rémi Bezançon, le réalisateur espiègle du Premier jour du reste de ta vie et Un heureux évènement. Celui-ci portait l’idée de ce conte africain depuis dix ans et a dû attendre d’être un cinéaste confirmé pour pouvoir se lancer dans une aventure tout en dessin et principalement en 2D où l’aide d’un technicien de renommé n’a pas été un luxe, au vu de l’ampleur du projet (plus de 250 personnes ont travaillé sur le film à travers le monde et huit studios ont été concernés).
Si a priori le projet Zarafa paraît un peu superflu au cinéphile contemporain qui n’a pas oublié les deux Kirikou et les autres contes de Michel Ocelot, le résultat dépasse merveilleusement les attentes. Cette saga africaine à culottes courtes, où se côtoient Africains de tribu, bédouins égyptiens, pirates grecs ou esclavagiste français, distille dès les premières scènes un charme exotique certain, celui de l’Afrique du XIXe siècle. Oui, celle des récits de colonie avec un sous-texte toutefois plus que critique à l’égard de l’action européenne (le méchant est un cruel Français qui abuse de son arme et de son fouet) et un contexte historique savamment amené (les enjeux du port d’Alexandrie, l’érection de l’obélisque de Louxor à la Concorde).
Si Bezançon, ici scénariste, n’hésite pas à offrir aux jeunes spectateurs tous les éléments inhérents à ce type de récits initiatiques (mise en abîme de l’histoire qui est contée par un vieillard dans un village ancestral, un gentil gag de prout, la mise à mort de deux animaux et même une larme versée de la part d’une bête, et autres raccourcis d’écriture primaires…), c’est bien dans les idées visuelles et l’esprit d’aventure que l’on aime se perdre durant la projection. Dans les douces couleurs pastel des cieux de fin de journée du continent du sud, dans les plans poétiques qui jonchent le parcours du jeune héros, Maki, et de sa girafe (Zarafa, donc), tout au long de leur odyssée, qui les mène de la savane au désert, en passant par la capitale égyptienne et les pyramides, par delà les airs et les mers, Marseille, la Provence, et les sommets enneigés de l’Hexagone, jusqu’au zoo de Vincennes… Le tout avec un trait de crayon qui a un certain cachet, davantage dans l’esprit de nos bande-dessinées d’aventure, que dans celui des péripéties animées de Disney ou Dreamworks.
Bref, une très bonne surprise qui saura convaincre une bonne partie des parents.