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Les aventures du Prince Ahmed – Lotte Reiniger

Les aventures du Prince Ahmed – Lotte Reiniger

Dans un royaume d’Orient, le jour de l’anniversaire du calife, son fils Ahmed enfourche le cheval ailé qu’un sorcier africain a fait apparaître à l’aide de sa magie ancestrale. L’animal entraîne le jeune prince dans une grande aventure, loin de son pays d’origine. Ahmed atteint bientôt l’île de Wak-Wak. Subjugué par sa beauté, le jeune homme enlève la souveraine des lieux. Mais les démons de l’île, comme le sorcier africain, ont juré sa perte. Capturée par le mage, la belle princesse est vendue à l’empereur de Chine. Ahmed, aidé par une sorcière, tente d’organiser son évasion…

Quelle délicate beauté ! Tiré des contes des Mille et Une Nuits, ce film s’inspire en particulier des Contes du Cheval volant et d’Aladin. Et c’est bien ce caractère volant, gracieux, presque magique qui nous enveloppe dès les premiers plans de ce bijou de l’animation. Quasiment 100 ans après sa réalisation, ce film garde toute sa singulière grâce, comme par enchantement, comme si le temps n’avait pas prise sur ce film d’animation en papier découpé.

Unique en son genre, il est bon de rappeler ici comment cette grâce fut possible. En effet, le film est conçu à partir de silhouettes découpées, articulées aux épaules, aux coudes et aux hanches, et animées à l’aide d’un bâton. Elles sont posées à plat sur une feuille de papier transparent qui repose elle-même sur une table trouée en son milieu, et recouverte d’une vitre. Ainsi disposées, les silhouettes sont filmées dans différentes positions, image par image, sur des fonds de couleur. Il aura fallu pas moins de trois ans à Lotte Reiniger et à son équipe pour fabriquer les trois cent mille images nécessaires pour réaliser son film.

C’est bien cette richesse inouïe qui se déploie sous nos yeux enchantés. Nous sommes embarqués dans un récit étrange, découpé en cinq actes et dont nous sortons envoûtés. L’intrigue est farfelue, parfois bizarre et pas évidente à comprendre, mais les silhouettes découpées, au contour si net, telle une dentelle, sont si vibrantes que l’aura l’emporte sur la compréhension. C’est un tour de magie que ce théâtre d’ombres orientalistes. Les costumes sont tout aussi merveilleux et abstraits que les décors et les animaux. Tout est ciselé et si précis. Chaque personnage est noir comme si la lumière relevait du surnaturel, et c’est bien cette inversion qui fait toute la puissance du film. Les jeunes spectateurs ne peuvent qu’être ébahis et étourdis par le voyage qui leur est offert, de la ville à la Chine, de l’île merveilleuse aux volcans cracheurs de feu, des démons à la sorcière. Les scènes vibrent par leur extraordinaire beauté, comme la chevauchée aérienne du prince Ahmed. On comprend facilement pourquoi ce film fut et demeure une source d’inspiration, pour tous.

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